Pour démarrer cette deuxième journée de l’Assemblée Populaire du Rhône, il est proposé aux panélistes pendant quelques minutes d’incarner le Rhône de son glacier jusqu’au delta méditerranéen et d’en faire le récit. Les imaginations se plient à cet exercice, les récits s’enchaînent et finalement émerge des panélistes l’interrogation suivante : le Rhône pourrait-il avoir des sentiments ?
De retour en plénière, c’est le moment pour l’équipe « des Questions, des Réponses » de répondre aux interrogations de la veille. On apprendra par exemple que l’ensemble des barrages conçus sur le Rhône ont vocation à produire de l’hydro-électricité ou bien que l’esturgeon européen, poisson endémique du Rhône, a malheureusement complètement disparu dans le fleuve en raison de la surpêche et des ouvrages hydrauliques.
Il est à présent temps d’assister à la conférence de Christian Bréthaut, co-dirigeant de la Chaire Unesco en hydropolitiques à l’Université de Genève sur le thème de « la gouvernance transfrontalière du Rhône ». Premier constat, la guerre de l’eau tant redoutée n’aura peut-être pas lieu. En effet, en matière de gestion transfrontalière à l’échelle mondiale, c’est la coopération la norme (plus de 200 accords de partage signés depuis 1948) et le conflit, l’exception (30 conflits sur l’eau avérés sur la même période).
Le Rhône à cheval sur la frontière franco-suisse est victime d’une fragmentation institutionnelle. En d’autres termes, de très nombreux acteurs publics comme privés sont impliqués en matière de gestion mais il n’existe à ce jour que peu de coordination entre eux. Aucun accord cadre de gestion n’a été signé entre les pouvoirs français et suisses et la question est de savoir si la structure de gouvernance telle qu’elle existe aujourd’hui résistera au changement climatique et aux modifications du régime hydrologique de demain, et au-delà au dépassement des limites planétaires. D’après les outils de modélisation existants, le débit du Rhône pourrait diminuer de 63% d’ici 2100 en raison notamment de la fonte des glaciers.
Le Rhône a longtemps été vu comme un outil au service de la production notamment énergétique de la France, de l’hydro-électricité au nucléaire. De nombreuses questions aujourd’hui se posent : cette vision productiviste sera-t-elle amenée à évoluer à l’avenir ? L’accord cadre franco-suisse favorisant la gestion commune du Rhône sera-t-il bientôt signé ?
La conférence est suivie d’un temps de questions/ réponses avec l’expert en présence, Christian Bréthaut avant de passer à la pause repas.
L’après-midi, les panélistes sont accompagnés d’experts tels que Gilles Mulhauser (Directeur de l’Office Cantonal de l’Eau de l’Etat de Genève), Fabio Heer (Gestionnaire de portefeuille d’actifs et environnement aux Services Industriels de Genève), Frédéric Laval (Bureau d’études BURGEAP) et Florestan Giroud (pêcheur et pêche scientifique en Savoie). Ils sont invités à travailler en adoptant une posture critique, en sous-groupe, sur 4 thématiques : Eau, Energie, Sédiments et Pêche. A l’aune de ce qu’ils ont entendu, les panélistes identifient un panorama de problématiques en adoptant plusieurs points de vue (celui du fleuve, celui du Delta, celui de l’Etat…). Vis-à-vis du mandat confié à l’Assemblée populaire du Rhône, 4 thématiques majeures sont priorisées : la pollution, pêche et poissons, le futur, la dualité. La journée se termine par l’identification par les panélistes de pistes de solution aux problématiques pré-identifiées.
Enfin, chacun partage sa « pépite » de la journée : le partage de la culture franco-suisse, la connaissance apportée par les experts, la richesse des ateliers en sous-groupe, le ressenti terrain d’un pêcheur professionnel ou bien même pour certains la poésie suisse.
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